La dégradation de la France par l'agence de notation Standard & Poors est un acte de guerre contre notre peuple. Avec un décorum d'objectivité pseudo-scientifique censé impressionner les braves gens, les agences de notation se présentent en observateurs infaillibles et impartiaux. Or ce sont des entreprises privées, fort profitables même dans le cas de S&P qui se vante d'une rentabilité de 43%. Leur croissance fulgurante accompagne l'augmentation des opérations de prêt. Elles ont donc partie liée à l'explosion vertigineuse de l'endettement privé et public dont elles sont censées garantir la solidité.
Ce sont des bras armés de la finance et des agents zélés de la financiarisation de l'économie. Voilà pour l'impartialité. Quant à leur fiabilité, on se souvient qu'après avoir noté AAA pendant des décennies les Etats-Unis malgré leurs déséquilibres colossaux, S&P les a dégradés pour appuyer la lutte des républicains en faveur de nouvelles coupes budgétaires. Au moment de justifier économiquement une décision purement politique, S&P s'était trompé de 2000 milliards de dollars dans ses calculs. Une paille.
Nous faisons donc face à des adversaires. Le monde n'est pas dirigé par une aimable constellation de premiers de la classe. Il est le lieu d'un affrontement permanent pour le partage de la richesse produite qui se concentre aujourd'hui entre les peuples et la finance. L'heure n'est donc pas à la contrition mais à la résistance. Tout de suite et sans barguigner car chaque atermoiement renforce l'assurance de l'adversaire et chaque concession nous enfonce dans la vis sans fin austérité – récession.
La France a les moyens politiques et économiques de tenir tête aux banques. Notre économie est productive.
L'épargne des Français est bien suffisante pour nos besoins. La difficulté se concentre sur la politique. La soumission de Sarkozy à la finance est une invitation au pillage du pays. Et les quatre candidats présentés comme les seuls en position d'être au second tour par le système médiatico-sondagier proposent tous des plans d'austérité. La finance croit donc pouvoir lancer impunément ses attaques en plein milieu de la présidentielle. Heureusement il y a un grain de sable.
La poussée du Front de Gauche est en train de faire basculer le cours de l'élection. Le point de vue austéritaire n'est plus seul et l'on voit déjà chacun, s'efforcer d'en tenir compte en mettant de l'eau dans son vin. Le moment n'est plus si loin où tous ceux qui suivront ces agences seront recrachés.
François Delapierre
Aussitôt la perte du Triple A annoncée, le Front de Gauche appelait les citoyens à se rassembler devant le siège parisien de Standard & Poor's. De trente personnes vendredi soir à trois cent dimanche, la mobilisation prend de l'ampleur. Présent, Jean-Luc Mélenchon a pris la parole pour lancer un appel à la résistance.
« Nous sommes les têtes dures de ce pays, rien ne nous fait céder, nous n'avons pas peur de vous » déclare le candidat du Front de Gauche à la présidentielle. « Un triple zéro pour Moody's et Standard & Poor's, nous vous méprisons ! » poursuit-il, acclamé par la foule. Avant d'ajouter, non sans humour, « je dis aux gens qui habitent dans ce quartier, regardez bien, dès qu'une agence de notation vient, tous les biens se dégradent à commencer par les vôtres, car on ne peut plus dormir tranquille ici ! ». Les manifestants, munis de casseroles et de sifflets aquiescent en rigolant, et en redoublant de bruits.
Un nouveau rassemblement est appelé ce soir – lundi 16 janvier à 18h devant le siège de Standard & Poor's, 40 rue de Courcelles à Paris (8e arrondissement). Pour l'instant, seul le Front de Gauche s'est clairement engagé dans une opposition aux mesures d'austérité. Ses militants seront-ils rejoints dans la rue par d'autres militants de gauche ?